GASTRONOMIE … Hiroki Yoshitaké, une étoile dans le ciel parisien

21 mai 2016
GASTRONOMIE … Hiroki Yoshitaké, une étoile dans le ciel parisien

Au Sola restaurant, dans le 5ème arrondissement de Paris, « l’art de la table » prend vraiment tout son sens avec le chef Hiroki Yoshitaké aux commandes.  Rue de l’hôtel Colbert, au premier abord, rien de bien particulier, si ce n’est un lieu bien privilégié. A deux pas de Notre-Dame, dans une ancienne auberge du XVIIème siècle avec poutres apparentes et boiseries vernissées, le ton est donné dès l’entrée franchie. Mais si, au rez-de-chaussée, le Sola offre une salle à la décoration française classique, en sous-sol, changement de décor dans la plus pure tradition japonaise : tables basses de bois clair et coussins sur le sol pour une assise confortable. L’ambiance est zen dans un sublime espace voûté aux murs de pierres du XIème siècle.

Vous êtes un grand voyageur, à ce que l’on dit, pourquoi avoir choisi de vous installer à Paris ?
Oui c’est vrai, j’ai beaucoup voyagé, surtout en Asie. J’ai d’ailleurs eu un premier restaurant à Singapour. Je connais bien la Chine, Taïwan, l’Inde mais, pour moi, il n’y a pas mieux que la gastronomie française. J’ai une réelle passion pour cette cuisine et Singapour n’avait vraiment pas la même aura que Paris. Même si j’ai des affinités pour la cuisine japonaise de mes origines, mes bases sont la cuisine française que j’ai étudiée à l’école dans mon pays.

Votre univers gastronomique est assez personnel, toujours d’un raffinement extrême. Est-ce dû à ce mélange franco-nippon ? Comment vous définiriez vous ?
Ma cuisine, côté technique, finalement est plus proche de la gastronomie française que de la cuisine japonaise pure. Par contre, ma culture, immanquablement, joue un rôle très important. Chaque plat n’est pas pensé pour être un plat franco-japonais. Je pars tout d’abord d’une recette de cuisine française classique mais, à l’arrivée, la façon de composer ce plat, la façon de le dresser avec toute ma culture, ma sensibilité, mes souvenirs qui refont surface, il devient tout autre.   

Sola, restaurant japonais Paris

Au Sola, dans le salon japonais du sous-sol, le dîner devient cérémonie. Il faut d’ailleurs se déchausser à l’entrée. Des chaussons, bien rangés sur leurs étagères, sont alors délivrés à la clientèle. Le décor épuré est primordial, proche de la nature : les pierres, le bois du mobilier, la blancheur du linge de table. Le service se fait à genoux au niveau des tables basses où des fosses se sont glissées discrètement dessous pour permettre néanmoins à la clientèle de s’asseoir à l’européenne.  

Monsieur Yoshitaké, pourquoi faire un menu dégustation ? Le client vous donne carte blanche, il ne sait absolument pas à l’avance ce qu’il va alors manger ?
Non, personne ne sait. Pour moi l’effet de surprise, d’étonnement que ça déclenche est important. De plus, c’est une succession d’une dizaine de plats, donc c’est mieux ainsi et ça me permet également d’emmener l’autre dans une totale découverte, un peu comme dans une symphonie avec ses temps forts et ses instants plus tempérés. Rassurez-vous, au moment des réservations, nous demandons à notre clientèle de nous signaler les problèmes d’allergies ou de contraintes alimentaires de chacun. Je vous assure, la découverte fonctionne à chaque fois ! Les gens sont hyper curieux et surtout ravis de se laisser guider.

Ainsi chaque jour, vous réinventez votre cuisine ?
Chaque saison arrive avec ses propres produits et je donne une importance extrême aux légumes. Bien sûr, mon côté japonais fait qu’il y a beaucoup de poissons et de crustacés dans mes recettes mais je reste plus qu’attaché aux légumes. 

Votre inspiration vient donc du marché ?
Oui, tout tourne autour de ce que je trouve sur les marchés.  Je suis très pointilleux quant au choix de chaque produit. J’aime tout ce qui est frais. Ensuite j’imagine mes recettes qui restent à peu près les mêmes pendant un mois. Enfin, elles se ressemblent peut-être mais ne sont jamais semblables… D’ailleurs, en cinq ans, je n’ai jamais ressorti les mêmes plats.

Sola, cuisine japonaise

La dégustation peut commencer, les serveurs sont aux petits soins de chacun. Aussitôt, la même constatation se fait autour des tables : le chef témoigne d’une maitrise culinaire à couper le souffle et son amour démesuré pour les produits se dégage vraiment de chaque plat. Sa cuisine, savamment orchestré, pensée comme une douce mélodie aux accents végétalisés, est élaborée, raffinée, d’un équilibre rare. C’est de plus un véritable artiste. Dans ce voyage gustatif, les présentations sont extrêmement soignées et la vaisselle toujours choisie avec justesse. Très peu de vaisselle blanche, surtout de la pierre, beaucoup de pierre, qu’il est de bon ton de toucher lorsqu’elles arrivent chaudes, contrairement aux autres restaurants. Cette chaleur au creux des mains donne alors une autre dimension, une autre approche au plat dégusté, plus sensuelle, plus émotionnelle.

C’est en 2012 que vous avez eu votre étoile Michelin, il me semble ?
Oui, nous avons ouvert en novembre 2010 et d’après ce que l’on m’a dit, le guide Michelin, à cette époque de l’année, est en impression, donc, c’est peut-être pour cette raison que j’ai reçu mon étoile en mars de l’édition suivante, en 2012. (dit-il avec un petit sourire moqueur)

En France, vous vous êtes formé au près de William Ledeuil au Ze Kitchen Galerie, de Pascal Barbot de l’Astrance, mais qui ou quoi vous a donné cette passion de la gastronomie au départ ?
Adolescent, je ne savais pas vers quelle branche me tourner et ma famille me poussa vers une école de cuisine. Mais je crois avoir décidé de devenir chef à l'âge de douze ans lorsque j’ai découvert le chef Hiroyuki Sakai dans l'émission télévisée Iron Chef.

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Sola
12 Rue de l'Hôtel Colbert
75005 Paris
+33 (0)143 29 59 04

Publié dans : Lifestyle